VINSOBRES



Lacroix : Statistiques du département de la Drôme 1835



VINSOBRES



VINSOBRES (Vinsobrioe). - Il est sur le penchant d'un coteau qui domine la plaine arrosée par la rivière d'Eygues, à l'ouest et à 8 kilomètres de Nyons. La situation en est agréable et le paysage varié à l'infini. Le hameau des Cornu, à l'orient, vers les confins de Venterol, et celui des Chauvet, à l'occident, près des limites de Saint-Maurice, en dépendent. La population de la commune est de 1,576 individus. La plaine d'Eygues et le coteau sur lequel est bâti le bourg sont les meilleures parties du territoire. Dans les autres, le sol est aride, sec et caillouteux. Les productions principales sont les olives, le blé et la soie. L'olivier, qui s'y trouve à l'abri des vents du nord, y est très beau ; le vin y est fort bon aussi, et ceux qui se plaisent à trouver partout des étymologies lui attribuent celle de Vinsobres, « la chaleur et la violence de ce vin, dit M. de Suarès dans sa Description de l'ancien diocèse de Vaison, en prescrivant, en effet, la sobriété. »
On prétend qu'il a été battu monnaie à Vinsobres, au coin des premiers princes dauphins.
On y a compté jusqu'à dix-sept co-seigneurs à la fois. Au moment de la révolution il y en avait encore quatre. On y voit la maison dans laquelle le seigneur majeur recevait le serment des co-seigneurs et l'hommage des habitans. Elle était flanquée d'une tour appelée la tour de Paris. On voit aussi des débris de remparts qui annoncent une place qui dut être très forte au XVme et au XVIme siècle. Elle joua un rôle actif dans les troubles civils et religieux. Il fallut la présence des comtes de Tende et de Suze, avec des forces considérables, pour l'enlever en 1568. Les protestans ne tardèrent pas de la reprendre, et Vinsobres ne retourna à l'obéissance du roi que lors de l'édit de Nîmes de 1629. Un vieux temple, situé dans la partie supérieure du bourg, fut jusqu'en 1700 l'église des catholiques.
A l'époque des dragonnades, l'autorité proposa aux protestans, qui formaient alors, comme aujourd'hui, plus des deux tiers de la population, de se réunir aux catholiques. Effrayés par ce qui se passait en Languedoc, ils n'osèrent refuser ; mais ils objectèrent que l'église était trop petite pour contenir les deux partis. Le gouvernement leva cette difficulté : il fit construire une autre église plus vaste et plus commode ; la première pierre en fut posée en 1685, et l'édifice terminé en 1700 ; c'est l'église d'aujourd'hui. Les protestans cherchèrent à gagner du temps, et finirent par ne pas se réunir. Il y a une trentaine d'années que l'ancienne église leur a été cédée ; ils l'ont réparée et en ont fait leur temple.
Vinsobres a de mauvaises rues, quelques-unes sont escarpées, mais les maisons en sont assez bien bâties pour une commune rurale. Ses habitans sont actifs et industrieux ; ils commercent principalement sur les huiles d'olive. Il se tient à Vinsobres trois foires par an.
C'est sur son territoire et près de la rivière d'Eygues que se trouve le marais dont j'ai parlé page 235, et dont le desséchement enrichirait ce pays, en même temps qu'il y ferait cesser toute cause d'insalubrité.
Au bas du bourg, près de la grande route de Nyons à Saint-Maurice, est le château de Véronne, habité par M. d'Archimbault, membre du conseil général et ancien député de Vaucluse.
C'est la patrie de Martin-Joseph-Bruno Moreau de Véronne, ancien président de la chambre des comptes de Dauphiné, et l'un de nos plus savans archéologues. Plusieurs académies de province l'avaient admis dans leur sein ; il fut un des membres les plus distingués de celle de Grenoble, à laquelle il lut souvent des mémoires et des dissertations d'un grand intérêt sur les recherches historiques et numismatiques auxquelles il se livrait, et particulièrement sur l'histoire des Voconces. Né le 28 janvier 1739, il est décédé au château de Véronne le 25 décembre 1796.
Le pavé de la petite chapelle de ce château est une mosaïque trouvée au Puymeras, près de Vaison, et transportée à Vinsobres par les soins de ce savant.

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